L’art, la musique et les fleurs : telles étaient les passions communes de Christian Dior et de sa sœur, Catherine Dior, de douze ans sa cadette. Leur inséparable et indéfectible lien est montré dans la nouvelle série d’Apple TV+, The New Look, sous les traits de Ben Mendelsohn (Rogue One, Ready Player One) et de Maisie Williams (Game of Thrones). Derrière la fiction, l’histoire de Ginette Dior, surnommée Catherine, réapparaît au grand jour. Une histoire qui ira jusque dans les camps de concentration de la Seconde Guerre mondiale.

De Paris au sud de la France

Catherine Dior est née le 2 août 1917. Dernière d’une fratrie de cinq enfants, elle grandit auprès de son père Maurice Dior, grand industriel et propriétaire d’une usine d’engrais, et de sa mère, Madeleine Martin. Alors que les affaires du patriarche prospèrent, le krach boursier de 1929 précipite l’entreprise dans la faillite. Un an plus tard, une grave maladie nerveuse est diagnostiquée à l’un de ses grands frères, Bernard. Sa mère ne s’en relèvera pas, et meurt de chagrin l’année suivante.

Le reste de la famille Dior finit par quitter Paris pour s’installer à Callian, dans le sud de la France. D’une spacieuse maison parisienne, Catherine Dior passe à une ferme isolée et sans électricité. Pour assurer que toute la famille mange à sa faim, elle cultive des haricots verts et des petits pois tout autour du terrain qui entoure la résidence. Une deuxième partie d’enfance qui contraste avec l’opulence dans laquelle la famille Dior a baigné pendant plusieurs années, et qui ne sera pas sans incidence quant à ses futurs choix.

L’engagement dans la Résistance et la déportation

Lorsque la Seconde Guerre mondiale éclate, Catherine Dior rejoint son frère, démobilisé, à Paris. Trois choix s’offrent à elle, comme à tous les Français et les Françaises qui subissent l’occupation allemande : la collaboration, subsister avec les moyens du bord, ou bien entrer dans la résistance. Elle choisira cette dernière option, également guidée par son amant, le résistant Hervé des Charbonneries. La jeune femme engagée intègre le réseau franco-polonais F2, au sein de la Résistance intérieure. Elle est chargée de fournir des rapports aux services secrets britanniques, au coeur de ce réseau spécialisé dans le renseignement sur l’armement et les agissements de l’armée allemande.

Justine Picardie, autrice de la biographie Miss Dior (Flammarion), est parvenue à se procurer les dossiers des archives militaires de Catherine Dior. Cette dernière est louée pour "son calme, sa capacité à prendre des décisions et son sang-froid". Elle sera également amenée à relever et cartographier certaines infrastructures militaires allemandes, notamment du côté de Marseille.

Le 6 juillet 1944, quatre hommes armés arrêtent violemment Catherine Dior du côté de la place du Trocadéro. Emmenée de force dans un appartement servant d’annexe à la Gestapo, elle sera torturée pendant plusieurs jours, mais ne révélera rien. Elle sera finalement transférée au camp de concentration pour femmes de Ravensbrück, où elle restera jusqu’en mai 1945. Libérée, elle ressort très affaiblie, physiquement et mentalement. Son engagement dans la Résistance lui vaudra d’être décorée de La Croix de guerre, de la croix des Combattants, ainsi que de la Légion d’honneur.

Muse malgré elle

En 1947, Christian Dior lance sa première collection de haute couture. Le créateur impose une nouvelle forme de féminité, avec des pièces iconiques comme la veste Bar. Cette dernière serait directement inspirée de Catherine Dior, seul membre de la famille à être présente à ce premier défilé. Après la guerre, cette dernière s’est installée avec Hervé des Charbonneries et se lance dans la vente de fleurs. Elle se prend de passion pour les roses. Un amour partagé avec son grand frère, duquel naîtra le parfum Miss Dior, ainsi que plusieurs robes.

Alors que son frère prend toute la lumière, Catherine Dior fuit les projecteurs. Elle assiste pourtant ce dernier, lui offrant malgré elle l’inspiration nécessaire pour son travail. Le 24 octobre 1957, Christian Dior meurt d’une crise cardiaque. Catherine Dior s’investira alors dans l’œuvre de ce dernier, notamment en tant que présidente d’honneur du musée de Granville. Elle finira par abandonner le commerce de fleurs pour se consacrer à la culture des roses et du jasmin. Elle meurt le 17 juin 2008 à Grasse, à l’âge de 80 ans. Elle aurait porté le parfum Miss Dior jusqu’à la fin de sa vie.