Ce témoignage de Josephine Abou Abdo a été recueilli par la journaliste grand reporter Caroline Laurent-Simon.

"Comment nous sentons-nous, nous, les jeunes Libanais·es ? Seul·es, sans défense, incapables de faire le moindre projet pour notre futur...

Un enchaînement d'événements dramatiques

Il y a eu la terrible explosion du port de Beyrouth le 4 août 2020 qui a fait 235 morts, 6 500 blessés et d’innombrables sans-abri, nous sommes confronté•es depuis 2019 à une longue crise politique et à une terrible crise économique qui ont plongé la population dans la précarité et le désarroi, et en septembre dernier, de violents bombardements israéliens sur Beyrouth ont commencé...

Tous ces événements dramatiques, pour nous qui sommes si attaché·es à notre culture, à nos racines, nous ont brisé le cœur.

"Les moindres besoins basiques" hors de prix

Ici, le coût de la vie ne cesse d’augmenter, les moindres besoins basiques, comme se nourrir ou se loger, coûtent de plus en plus cher. Et nous n’avons même pas de gouvernement qui serait en mesure de réguler les prix !

Il est si difficile d’avoir des rêves aujourd’hui...

Quant à trouver du travail, cela relève de la plus grande incertitude. Sans compter qu’en temps de bombardements, les écoles et les lycées restent fermés. C’est comme si tout le pays était sur pause.

Pourtant, malgré toutes ces épreuves, la jeune génération libanaise trouve encore du courage et de la détermination, et nombreux·ses sont celles et ceux qui refusent de s’exiler. (...)"

"(...) Je dirais que nous n’avons plus de véritables aspirations pour notre futur. Il est si difficile d’avoir des rêves aujourd’hui...

Dans ma génération, nous avançons pour la plupart au jour le jour. Mais l’espoir demeure, et je pense qu’une fois que nous aurons passé cette situation qui dure depuis plusieurs années, nous serons capables de vivre de façon éclatante.

S'insuffler solidairement du courage

Nous sommes un peuple et un pays faits de plusieurs communautés qui vivent ensemble, réunis par une culture solide, remplis de petites choses qui sont vitales en ce moment : notre amour pour les déjeuners du dimanche, les montagnes du Liban, l’huile d’olive, nos grands-mères...

Nous nous rechargeons en courage les un·es avec les autres. Le peuple libanais se soutient, comme on le voit à travers les initiatives prises au sein de notre cantine solidaire Nation Station.

J’ai un message personnel pour celles et ceux qui me liront dans ces pages : continuez, dans le monde, à partager et à affirmer votre soutien face à tout ce que nous subis-sons. Nous nous sentons seul·es et avons besoin de chacune de vos voix pour nous aider à surmonter tous ces drames."

Cette tribune a initialement été publiée dans le magazine Marie Claire numéro 867, daté décembre 2024.